XXe Siècle, siècle de l’art moderne : un regard bref, parcellaire et très personnel sur ces mouvements artistiques qui ont rué dans les brancards.

On va parler d'art, celui du XXe siècle : de l’innovation, des remises en question, de la couleur, quelques provocations. Un siècle où l’art témoigne comme rarement des transformations, des évolutions de l'époque. L’art se met en phase avec les goûts, les préoccupations, les enjeux, les désirs du moment.

4/24/20259 min read

Quelques pionniers brisent les codes et se placent à l’avant-garde artistique.

Le fauvisme fait hurler les couleurs

Imaginez des couleurs si vives qu'elles vous sautent aux yeux ! Henri Matisse, c'est chef de file du fauvisme, mais aussi André Derain et Maurice de Vlaminck. Leurs œuvres, comme "Le Luxe II" de Derain, sont des explosions de couleurs qui défient les conventions académiques. Le fauvisme, c'est l'art de la liberté chromatique, un feu d'artifice visuel. Une femme s’y fait une place de choix : Marie Laurencin. Avec ses portraits délicats et ses couleurs pastel, elle apporte une touche féminine et poétique à ce mouvement explosif. Son œuvre "Les Jeunes Filles" (1911), un chef-d'œuvre de douceur et de grâce, est un véritable souffle d'air frais dans un monde artistique dominé par les hommes.

Les formes se déconstruisent et se reconstruisent : l’arrivée du cubisme.

Pablo Picasso et Georges Braque sont les stars incontestées du mouvement. Mais des artistes tels que Juan Gris font aussi des merveilles. Le "Violon et Palette" de Braque, est un exemple parfait de cette révolution des formes, où la réalité est fragmentée pour mieux être recomposée. Là encore, une femme s'impose : Marie Vassilieff. Cette artiste russe, installée à Paris, a su se faire une place dans le cercle très fermé des cubistes. Son atelier, devenu un lieu de rencontre pour les artistes de l'époque, témoigne de son influence. "La Femme au chapeau" (1913) est un exemple parfait de son approche unique du cubisme, mêlant géométrie et émotion. Felicia Pacanowska, elle aussi, se distinguera un peu plus tard avec ses paysages cubistes, avant d’aborder une abstraction plus radiclae..

L’art provoque : le dadaïsme et le ready-made furent.

Impossible de parler des révolutions artistiques sans évoquer Marcel Duchamp. En 1917, sa "Fontaine", un urinoir signé "R. Mutt" et présenté comme une sculpture, bouleverse et questionne les codes de l'art. Le ready-made, c'est l'art de transformer un objet du quotidien en œuvre d'art, simplement par le choix de l'artiste. Provocateur et conceptuel, Duchamp ouvre la voie à une nouvelle manière de penser l'art.

Dans les années 20, l’art figuratif est loin d’être vaincu

Les années 1920 en Europe sont également marquées par un renouveau de l'art figuratif, où les artistes explorent de nouvelles manières de représenter la réalité. Ce mouvement, souvent appelé "réalisme magique" ou "néo-réalisme", se distingue par une attention particulière aux détails et une volonté de capturer l'essence de la vie moderne.

George Grosz en Allemagne est l'un des représentants les plus marquants de ce mouvement. Ses œuvres, comme "Metropolis" (1917), sont des critiques acerbes de la société de l’époque, avec des représentations satiriques de la vie urbaine et des élites. Grosz utilise un style figuratif pour dénoncer les injustices sociales et les excès de la modernité.

En Italie, Giorgio de Chirico est une autre figure clé de l'art figuratif des années 1920. Ses peintures métaphysiques, comme "La Nostalgie de l'Infini" (1913), créent des paysages oniriques et énigmatiques, où les objets du quotidien sont placés dans des contextes étranges et déroutants. De Chirico explore les thèmes de la mémoire, du temps et de l'inconscient, tout en restant fidèle à une esthétique figurative.

En France, Balthus (de son vrai nom Balthasar Klossowski) est un artiste qui se distingue par son style figuratif unique. Avec "La Rue" (1933), une exploration poétique et mystérieuse de la vie quotidienne, il porte une attention particulière aux détails et aux atmosphères. Balthus crée des scènes intemporelles, où le réel et l'imaginaire se mélangent de manière subtile.

La Belgique est elle-aussi bien présente. Par exemple, Léon Spilliaert se distingue par un style singulier. Ses œuvres, comme "Clair de Lune et Lumières", sont des explorations poétiques et oniriques de la lumière et de l'ombre. Spilliaert, avec ses paysages nocturnes et ses scènes introspectives, apporte une dimension contemplative et mélancolique à l'art de son époque.

L'Art déco, qui émerge dans les années 1920, touche non seulement le design et l'architecture, mais aussi la peinture. Ce style, caractérisé par ses lignes géométriques, ses motifs stylisés et ses couleurs vives, reflète l'optimisme et la modernité de l'époque. Tamara de Lempicka, figure tout aussi antipathique qu’emblématique de ce mouvement, explose. Ses peintures, comme "Autoportrait (Tamara dans la Bugatti verte)", capturent l'élégance et le glamour de l'Art déco, avec des formes stylisées et des couleurs riches. L'Art déco en peinture, c'est la célébration de la modernité et du luxe. A la frontière des arts décoratifs et de la peinture, on trouve des panneaux décoratifs tels que ceux proposés par Gaston André dans ses projets d’aménagement.

Les années folles libèrent les corps et les esprits

Les années 1920 et 1930 sont marquées par l’apparition du surréalisme, un mouvement qui explore les profondeurs de l'inconscient. Salvador Dalí et René Magritte sont des figures incontournables, mais des artistes comme Yves Tanguy ont également laissé leur empreinte. Le "Maman, Papa est blessé !" de Tanguy est une plongée dans un monde onirique et étrange, où le réel et l'imaginaire se confondent.

René Magritte, en particulier, incarne l'esprit surréaliste belge. "La Trahison des Images" joue avec les perceptions et les réalités, invitant le spectateur à questionner ce qu'il voit. Magritte, avec son humour et son ironie, est un maître de l'illusion et de la provocation intellectuelle.

Parmi les figures féminines, Leonora Carrington se distingue par son univers onirique et fantastique et prouve que les femmes peuvent être tout aussi surréalistes que les hommes, voire plus. Son tableau "Le Cornet de la licorne" (1955) est une plongée dans un monde inconscient.

La révolution de l’art abstrait

L'abstraction laisse parler les émotions sans se soucier de la représentation du réel. Ce mouvement, qui émerge au début du XXe siècle, marque une rupture avec la représentation traditionnelle et ouvre la voie à une exploration sans limites des possibilités esthétiques.

Wassily Kandinsky est souvent considéré comme le père de l'art abstrait. Ses œuvres, comme "Composition VIII" (1923), sont des symphonies de couleurs et de formes, où chaque élément semble danser sur la toile. Kandinsky, influencé par la musique et la spiritualité, cherche à créer une harmonie visuelle qui touche l'âme du spectateur.

Mais Kandinsky est loin d’être le seul à explorer les possibilités de l'abstraction. Piet Mondrian, avec ses compositions géométriques et ses couleurs primaires, développe une approche plus structurée. Ses œuvres, comme "Composition II en rouge, bleu et jaune" (1930), sont des méditations sur l'équilibre et l'ordre, une quête de l'essence même de la forme.

Kazimir Malevitch pousse l'abstraction à son extrême avec le suprématisme. Son "Carré noir" (1915) est une déclaration radicale : un simple carré noir sur fond blanc, une affirmation de la pureté de la forme géométrique. Malevitch cherche à transcender la réalité matérielle pour atteindre une dimension spirituelle.

L'art abstrait, c'est aussi l'exploration des matériaux et des textures. Jackson Pollock, avec sa technique du "dripping", révolutionne la manière dont la peinture est appliquée sur la toile. Ses œuvres, comme "No. 5, 1948", sont des explosions de couleurs et de mouvements, une véritable célébration de l'énergie créatrice.

Sonia Delaunay est également pionnière dans ce domaine. Avec son mari Robert, elle développe l'orphisme, un mouvement qui joue avec les couleurs et les formes géométriques. Son œuvre "Rythme coloré" (1947) est une explosion de couleurs et de mouvements, une véritable célébration de la vie.

Enfin, Mark Rothko, avec ses grandes toiles monochromes, explore les possibilités émotives de la couleur. Ses œuvres, comme "Orange, Red, Yellow" (1961), invitent à la contemplation, des espaces de méditation où la couleur devient une expérience sensorielle. Il aurait aimé un espace spécifique dédié à la découverte de chacune de ses toiles. Révélateur.

L'art abstrait, c'est donc une multitude d'approches et de styles, mais toujours avec cette même quête de liberté et d'expression pure. C'est un mouvement qui a profondément marqué l'histoire de l'art et qui continue d'inspirer les artistes contemporains.

Les années de rébellion : l'art devient politique.

L'Expressionnisme abstrait, émotion à l'état pur

Après la Seconde Guerre mondiale, l'expressionnisme abstrait émerge comme un cri de liberté. Jackson Pollock et Mark Rothko sont des figures majeures de ce mouvement. Avec sa technique du "dripping", Pollock révolutionne la manière dont la peinture est appliquée sur la toile. Son œuvre "No. 5, 1948" est une explosion de couleurs et de mouvements, une véritable célébration de l'énergie créatrice.

Helen Frankenthaler s’impose comme une figure majeure de ce mouvement. Avec sa technique de la "tache" (color field painting), elle révolutionne la manière dont la couleur est appliquée sur la toile. Son œuvre "Mountains and Sea" (1952) est une symphonie de couleurs, une invitation à ressentir plutôt qu'à comprendre.

Le Pop Art : La Culture de Masse en Couleurs

Le pop art, c'est l'art de la consommation de masse, des couleurs vives et des icônes populaires. Andy Warhol et Roy Lichtenstein sont des figures emblématiques, mais des artistes comme James Rosenquist ont également marqué cette période. Le "F-111" de Rosenquist est un exemple parfait de son style, mêlant images de magazines et peinture pour créer un commentaire ironique sur la société de consommation.

Et bien sûr, on ne peut pas parler de pop art sans mentionner l'Angleterre ! Peter Blake, avec ses collages et ses références à la culture populaire, est une figure clé du pop art britannique. Son œuvre "On the Balcony" (1955-1957) est un hommage à la culture de masse, avec des références à la musique, au cinéma et à la mode. Rosalyn Drexler s’exerce elle aussi aux collages et ses peintures qui mélangent humour et critique sociale. Son œuvre "Put It This Way" (1963) est un exemple parfait de son style, mêlant images de magazines et peinture.

Les années de la diversité : l'art explose

L'art minimaliste : moins, c'est plus

Le minimalisme, c'est l'art de la simplicité, de la géométrie et de la répétition. Donald Judd et Frank Stella sont des figures emblématiques de ce mouvement. Les sculptures de Judd, comme "100 untitled works in mill aluminium", sont des méditations sur l'espace et la forme, une invitation à la contemplation. Les toiles, souvent monochromes et géométriques, d’Agnes Martin sont des méditations sur la lumière et l'espace. "Falling Blue" (1963) invite à la contemplation. Elle n’a d’autre ambition que d’offrir offre une pause dans un monde en perpétuel mouvement.

L'art conceptuel : l'idée, toute l’idée, rien que l’idée

L'art conceptuel, c'est l'art de l'idée, où le concept prime sur la forme. Joseph Kosuth et Sol LeWitt sont des figures majeures de ce mouvement. L'œuvre "One and Three Chairs" de Kosuth est un exemple parfait de cette approche dans laquelle l'idée de la chaise est explorée à travers trois de ses représentations : une chaise réelle, une photographie de chaise et une définition de la chaise. Adrian Piper est une artiste afro-américaine qui explore les questions d'identité et de race. Son œuvre "My Calling (Card) #1" (1986) est une performance où elle distribue des cartes expliquant qu'elle est noire, une manière pour elle de confronter préjugés et stéréotypes.

Le XXe siècle a été un siècle de révolutions artistiques, où la peinture a été le moteur de changements esthétiques profonds. Des fauves aux minimalistes, en passant par les surréalistes, les expressionnistes abstraits, les dadaïstes, les artistes belges et les maîtres de l'Art déco, les artistes de cette période ont su imposer leur vision unique et innovante. Leur héritage est un trésor précieux, un rappel que l'art est avant tout une question de passion, de créativité et de liberté. Et si parfois on peut être tenté de contempler leurs œuvres avec certaine ironie, un certain scepticisme ou une certaine circonspection, n’oublions pas que ces artistes extraordinaires ont marqué l'histoire de l'art à jamais. Quant aux femmes, elles ont-elles aussi au cours du XXeme siècle brisé les codes, repoussé les limites et ouvert la voie à de nouvelles générations d'artistes. Leur travail, souvent ignoré ou minimisé, mérite aujourd'hui toute notre attention. Plus encore que les hommes, elles soulignent que l'art n'a pas de genre, mais de vision, de passion et de courage.